8 trucs à savoir pour frimer en se servant un whisky
Voici quelques infos et ficelles à distiller en soirée pour jouer les érudits parmi les snobs du scotch. Comme disent nos amis anglais: «Fake it until you make it» —faites semblant tant que vous ne savez pas.
1.Commander un scotch sans bafouiller
Parce qu’ils dérivent le plus souvent du gaélique, parfois influencé par le scandinave et anglicisé par la suite, les noms des distilleries écossaises se prononcent d’une façon qui peut sembler très éloignée de leur orthographe. Commander au bar un «Glenfidiche» ou un «Glen Garioc» révèle le novice en plaisirs maltés avant même qu’il ait eu le temps de voir arriver son verre. Petit exercice approximatif de prononciation, sachant que les accents régionaux ajoutent des variations —et que les r se roulent mieux que les pelles en Ecosse.
Commençons par l’île d’Islay (prononcer «Aï-la»), qui fournit la majorité des merveilleux whiskies tourbés qu’affectionnent les Français, et qui font si bien fourcher la langue avant de la titiller. Laphroaig se prononce «Lafro-èg»; Bruichladdich ressemble à «Broukladi» (parfois «Brourladi», avec un r en jota espagnole); Bunnahabein se dit «Bounahabenn» en aspirant le h au milieu; Caol Ila résonne un peu comme «Col Ila» (parfois «Cool Aïla»); Kilchoman et Lagavulin? Un jeu d’enfant: «Kilkomann» et «Lagavoulinn».
Ailleurs, parmi les distilleries traîtresses à prononcer, citons Glenfiddich (entre «Glennfiddic» et «Glennfiddir», avec un r en jota espagnole), An Cnoc («Anok»), Auchentoshan («Arentoshenn», avec un r en jota), Knockando («Nokanndou»), Jura («Djoura»), Glen Livet («Glenn Livette»), et le piège à amateurs: Glen Garioch («Glenn Guiri»).
2.Lire l’étiquette sans se tromper
Etudiez rapidement la bouteille: elle vous livre quelques infos précieuses dont l’absence vous renseignera tout autant sur la (faible) qualité du produit. Le chiffre précédant un pourcentage indique le taux d’alcool. Il ne peut être inférieur à 40% pour mériter le nom de whisky, mais peut grimper bien au-delà.
Si l’âge est indiqué (cette mention tend à disparaître, y compris sur les bouteilles de grande qualité, en raison des difficultés des distilleries à maintenir des stocks face à la demande mondiale galopante), c’est celui du plus jeune whisky entrant dans la composition de la bouteille. Dans le Grant’s 25 ans, un blend assemblant 25 whiskies, l’eau-de-vie la plus ancienne est deux fois plus âgée et date de 1964. Le dernier embouteillage du Glenfiddich 40 ans, un single malt cette fois, incluait des fûts remplis en 1925, 1937, 1939, et au début des années 50 et 60 notamment!
La mention «scotch whisky» indique que le whisky a été fabriqué et vieilli en Ecosse. S’il a été distillé, mûri et embouteillé par une société autre que la marque, c’est le signe que son heureux possesseur n’a pas dépensé une fortune pour attraper la bouteille au prix d’un tour de reins au supermarché (oui, là, tout en bas du rayon). S’il s’agit d’un single cask (un seul fût a été embouteillé), le numéro du fût, de la bouteille et la date d’embouteillage sont signalés. Les éditions limitées sont numérotées.
3.Single malt ou blend, késaco?
Un single malt est un whisky élaboré à partir d’orge malté uniquement et provient d’une seule et même distillerie. Un blended scotch (ou blend) est un assemblage de single malts et de whiskies de grain (élaborés à partir de blé, de maïs, de seigle…): plus le scotch est jeune, plus il incorpore de whisky de grain (qui vieillit plus vite). Un blended malt associe des single malts de plusieurs distilleries. Le «pure malt» est un concept de marketeurs: il s'agit d'un blended malt qui préfère miser sur l'ambiguïté phonétique avec single malt plutôt que d'être pris pour un blend!
4.Whisky, whiskey: ne vous trompez pas!
Si les deux termes se prononcent de la même façon («whisky»), n’allez surtout pas les confondre! Il y a quelques années, devant le soulèvement de lecteurs offensés, le New York Times a dû publier de longues excuses embarrassées qui firent se gondoler la planète maltée. Le crime du vénérable quotidien? Il avait osé qualifier de «whiskeys» les scotchs du Speyside, cette région d’Ecosse qui compte plus de distilleries que de moutons au mètre carré. On connaît dans la presse française une poignée de correcteurs qui ont échappé de peu au goudron et aux plumes pour avoir ajouté ou ôté avec une inavouable légèreté un «e» crucial.
Alors, une bonne fois pour toutes: whiskey prend un «e» quand il est fabriqué aux Etats-Unis (bourbon, sour mash, rye) et en Irlande, et s’écrit «whisky» partout ailleurs dans le monde, de l’Ecosse au Japon. Ajoutons dans un souci de précision que, dès lors qu’il s’agit de single malts, certaines marques américaines laissent tomber le «e» sur leurs étiquettes. Mais… oublions!
5.Assemblage ou finish, on ne confond pas
Un assemblage est le mariage de plusieurs fûts de whiskies (potentiellement d’âges, de distilleries, de nature ou aux anciens contenus différents). Les blends sont par définition des assemblages (whisky de malt plus whisky de grain, voir le point 3), mais les single malts également —sauf si l’embouteillage précise «single cask», auquel cas l’alcool provient d’un fût unique. Pour recréer d’une année sur l’autre le goût du 12 ans d’âge que vous aimez recevoir à Noël, le maître de chai devra jouer sur quantité de fûts différents.
Le finish, lui, ajoute une ultime étape de maturation au whisky, qui vieillit dans un type de fût avant d’être transféré dans un autre pour y achever son hibernation, ceci afin d’ajouter d’autres arômes à l’eau de vie. Ces finitions peuvent faire preuve d’originalité: ex-fûts de madère, porto, cognac, bière, rhum…
6.Les plus grands buveurs de whisky sont…
Non, pas les Ecossais. Ni les Irlandais. Pas mêmes les Britanniques ou les Américains mais… les Français! En volume global comme en litres consommés par habitant, le scotch décroche haut la main le pompon d’alcool préféré des Frenchies —et ce depuis des lustres. Nous en sifflons joyeusement 126 millions de litres par an, soit 1,9 litre chacun (chiffres IWSR 2012). Une plaisanterie à côté des 13,9 litres de vodka que descend un Russe en douze mois…
7.Le single malt le plus vendu en France est…
Le single malt préféré des Français est l’Aberlour (1 million de litres vendus l’an passé), suivi du Glenfiddich. Pour les blends (près de 95% des ventes dans l’Hexagone!), William Peel arrive en tête (17,5 millions de litres). Au plan mondial, Johnnie Walker reste le leader indéboulonnable des blends (135 millions de litres écoulés) devant Ballantine’s, tandis que Glenfiddich règne sur les single malts (9 million de litres) devant Glenlivet.
8.Tiens, un whisky français
Si le whisky made in France reste discret, on se consolera en affirmant fièrement à Pierre qui raffole de l’Ardbeg ou à Paul qui fond pour le Chivas qu’ils boivent sans le savoir un scotch… français. Ou plus exactement appartenant à une entreprise française. Les grands groupes tricolores, en effet, ont depuis des années fait main basse sur une bonne partie de la production écossaise.
Glenmorangie ou Ardbeg appartiennent à Moët-Hennessy (LVMH); Chivas, Ballantine’s, Glenlivet, Jameson, Aberlour, Strathisla, Scapa ou Royal Salute —entre autres— prospèrent dans le giron de Pernod-Ricard (numéro deux mondial des spiritueux); Glen Turner, Label 5 ou Glen Moray sont chez La Martiniquaise; et Rémy Cointreau a racheté l’an dernier Bruichladdich. Se servir un whisky, un geste de patriotisme économique, en somme!
Christine Lambert
http://www.slate.fr/life/76708/whisky-huit-trucs-savoir-pour-frimer
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